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" CASSINOMAGUS. L’AGGLOMÉRATION ET SES THERMES.
Résultats des recherches récentes (2003-2010) à Chassenon (Charente)" dans : Aquitania 28 pp. 99-298 Doulan C., Laüt L., Coutelas A., Hourcade D., Rocque G., Sicard S. (coord.)
Présentation : Sur la commune de Chassenon (Charente), se trouvent les vestiges de l’agglomération de Cassinomagus, située à l’époque romaine aux confins occidentaux du territoire lémovice. Les recherches sur ce site commencent au XVIIIe s. et vont se développer particulièrement à partir du milieu du XXe s. Elles sont principalement tournées vers les monuments publics et notamment les impressionnants thermes de Longeas. Mais les rares travaux anciens, les prospections aériennes, pédestres et géophysiques, ainsi que les fouilles récentes, livrent des informations de plus en .../... plus précises sur le reste de l’agglomération. C’est un éclairage particulier qui est proposé dans ce dossier, sur les recherches menées par des équipes pluridisciplinaires entre 2003 et 2010 sur ce site.
En première partie, est présenté le nouvel état des connaissances sur les thermes. La question de leur alimentation en eau et de la gestion des eaux usées a conduit à étudier l’aqueduc de Longeas. Cet édifice, au tracé adapté au relief accidenté du site, a joué un rôle majeur dans la structuration et le fonctionnement de l’ensemble monumental et en particulier des thermes. Le plan de ces derniers a été notablement précisé grâce aux recherches menées sur leurs parties est et ouest. Leur façade, tournée vers l’est, ouvre sur le corps central constitué des pièces balnéaires qui sont cernées au nord, à l’ouest et au sud par des cours. Celles-ci sont délimitées au nord et sud par des galeries et à l’ouest par un simple mur. Des pièces d’angle nord-ouest et sud-ouest sont identifiées à des latrines et à un lieu de passage vers l’extérieur. Cet espace de circulation contenait aussi le bassin de réception de l’eau acheminée par l’aqueduc. Les thermes ont été conçus tels quels dès le départ. Leur construction a été entreprise probablement dans la première moitié du IIe s. p.C. et a été achevée vers la fin du même siècle. Deux états d’aménagement ont été caractérisés, en particulier grâce à la fouille des caniveaux et des égouts. La seconde moitié du IIIe et le IVe s. ont vu la lente dégradation de l’édifice, sa destruction puis sa transformation en carrière. Les travaux sur les matériaux de construction apportent un éclairage essentiel sur l’architecture et la décoration des thermes. Leur décor pariétal correspond aujourd’hui à des lots d’enduits peints très détériorés. Malgré tout, une esquisse de l’ornementation des salles thermales est possible. Celle-ci a été élaborée en deux phases avec une tendance soit décorative soit architecturale. L’étude des métaux “architectoniques” a précisé les données sur l’adduction, le stockage et le chauffage de l’eau, sur le renfort des maçonneries, l’isolation des parois, la préparation des enduits muraux, la suspension des plafonds et la pose des revêtements muraux. Les mortiers de maçonnerie et des joints de tuiles nous informent quant à eux sur les matériaux mis en œuvre dans l’édifice de bains. C’est aussi tout un pan de l’architecture des thermes, du savoir-faire des artisans et de la conduite du chantier qui se dévoile à travers l’étude des terres cuites architecturales (tubuli, briques). Enfin, la question des ateliers peut être approchée via leurs productions étudiées au sein même du monument.
La seconde partie de ce dossier aborde les autres secteurs de l’agglomération. La découverte inédite de vestiges protohistoriques est présentée en premier lieu. Situés à l’est de l’ensemble monumental, à proximité immédiate de l’aqueduc, deux fossés ont livré des quantités importantes de céramiques gauloises et d’amphores républicaines ainsi que deux objets en métal. Le point est fait ensuite sur les vestiges d’époque romaine précoce qui ont été reconnus dans deux secteurs. Au nord, dans le bourg de Chassenon, on observe des vestiges d’activités domestiques ou artisanales, avec des espaces couverts et des zones ouvertes, de travail ou de stockage. Une cave est accompagnée de deux puits dont l’un a livré de nombreux restes de bois. Ces occupations sont attribuables au tout début du Ier s. p.C. Au sud de l’aqueduc, une phase antérieure aux constructions de l’ensemble monumental a pu être identifiée, caractérisée par l’édification de plusieurs bâtiments successifs, en matériaux périssables. Les périodes suivantes sont ensuite considérées dans ces deux mêmes secteurs. Dans le bourg de Chassenon, seul du mobilier de comblement des structures précoces témoigne des activités qui se développent dans le secteur, au moins jusqu’au IIIe s. Au sud de l’agglomération, de nombreux aménagements sont observés. Un réseau de voirie parallèle et perpendiculaire à l’aqueduc est construit à la fin du Ier ou au tout début du IIe s. p.C. Au sud du pont-aqueduc, une nouvelle structure d’habitat en dur est implantée, qui s’apparente à une demeure de type urbain. Deux carrières ont aussi fait l’objet d’investigations archéologiques. Elles montrent la grande variété des produits exploités : gros blocs, dalles et moellons. Cassinomagus représente un cas unique d’utilisation massive de l’impactite comme pierre de construction. Les procédures et les outils ont été adaptés ici aux qualités de ce matériau particulier par sa couleur, sa texture stratifiée et sa densité.
En conclusion de ce dossier, sont exploitées les données de la carte archéologique de Chassenon réalisée sous SIG, pour proposer un premier essai de synthèse sur l’extension, l’organisation interne et l’évolution de Cassinomagus, mais aussi sur son espace rural environnant. Enfin, de nouvelles perspectives des recherches sont évoquées, dans le cadre du PCR mis en place en 2011 sur “Cassinomagus, l’agglomération et son ensemble monumental”.(plus) |